La crise/le conflit kachin en Birmanie est bien documenté. Les conséquences politiques, voire géopolitiques, de la lutte entre la KIA et la Tatmadaw (armée birmane) le sont moins. La KIA avec sa zone contrôlée, de facto un semi-État, créé une nouvelle configuration politique en constituant une zone tampon entre la Chine et la Birmanie. Selon une perspective historique plus récente, cela montre que le paradigme de « deux Birmanies » est en train de renaître sous de nouvelles formes. Ŕ plus long terme, c'est encore plus intéressant : les similitudes avec les schémas coloniaux du pouvoir sont frappantes.
Avant le 19e siécle, le Royaume birman fonctionnait selon un mandala, un systéme galactique du pouvoir. Le pouvoir rayonnait depuis le centre birman, mais devenait plus faible à mesure que la distance augmentait. Il se superposait dans les régions périphériques avec d'autres trames de pouvoir concentrique émanant d'autres puissantes capitales. Alors que beaucoup a changé depuis – le fait le plus important est que l'État birman n'est plus en possession de l'autorité morale émanant du roi bouddhique –, la situation se répète aujourd'hui dans la marge kachin.
Alors que le centre birman possède officiellement le territoire de la KIA, il ne contrôle pas cette marge. Comme la Tatmadaw n'est pas capable d'écraser la KIA, elle doit trouver une nouvelle façon de réincorporer la marge kachin ŕ l'État birman. Par ailleurs, les Kachins gravitent progressivement vers la Chine et la marge de la KIA pourrait devenir une avancée chinoise dans un pays voisin et le centre d'expansion d'une zone d'influence.
Nous pourrions alors observer un processus où la zone tampon de la KIA est située entre deux systèmes concentriques de pouvoir : birman et chinois. Le processus est fascinant en tant que tel, pour son rappel aux systèmes « mandala » qui a auparavant fonctionné en Asie du Sud-Est.
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The Kachin crisis/conflict in Burma is well-recorded. The political, or maybe geopolitical, consequences of this KIA-Tatmadaw struggle are less so. The KIA with her controlled area, a de facto quasi-state, creates a new political configuration of a buffer zone between Burma and China. In shorter historical perspective, it shows that the “two Burmas” paradigm is now being reborn in new forms. The longer perspective, however, is even more interesting. The similarities with pre-colonial patterns of power are striking here.
Before 19th century the Burmese Kingdom functioned on mandala, galactic system of power. The power radiated from Burman center, but became weaker as the distance from core grown and did overlap in the peripheral areas with other weaves of concentric power emanating from other capitals of strength. Although a lot changed in the meantime – the most important being the fact that the Burmese state is no longer in possession of the moral authority emanating from the Buddhist king – the situation is somehow being repeated in the Kachin margin now:
Despite formally having the KIA territory, the Burmese center does not control this margin. As the Tatmadaw is unable to crush KIA military, it must find a new way to re-incorporate KIA margin into Burmese state. Furthermore, the Kachins are increasingly gravitating towards China and KIA margin may become a foreign outpost in a neighboring country, and the centre of an expanding zone of influence.
We may, therefore, observe a process where the KIA buffer zone is located between two concentric ways of power: Burmese and Chinese. The process itself is fascinating, for it reminds the ways “mandala” system had worked in Southeast Asia before.
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