Le droit est – de manière primordiale – conçu comme un art du langage qui côtoie l'ambition (vaine) que John Locke exprimait en 1690 : « ... les mots qui signifient des choses qu'on connait et qu'on distingue par leur figure extérieure, devraient être accompagnés de petites tailles-douces qui représentassent ces choses. » (J. Locke, Essai sur l'entendement humain, 1690).
Les mots du patrimoine et leurs dérivés – substrat d'une critériologie pour nommer, à l'instar des tailles-douces de Locke – qu'énoncent les normes juridiques sont autant de tentatives pour circonscrire un objet qui se dérobe et se transforme sous la pression des perceptions sociales. Art du langage, le droit est un art de la représentation, adossé à un processus d'identification fondé sur des critères signifiants dans la sphère juridique. L'objet patrimonial ainsi marqué – identifié – est projeté dans la fixité de la règle de droit, expression d'une volonté – pour normer ce qui a été ainsi nommé – et support univoque d'une représentation abstraite du patrimoine ; les usages et les perceptions sociales sont relégués en périphérie de ces référents juridiques stables, sources de concepts figés, étrangers aux représentations patrimoniales produites par les communautés. Si, comme le suggère Arthur Schopenhauer, le langage n'est « qu'un télégraphe très perfectionné, qui transmet avec une rapidité et une délicatesse infinies des signes conventionnels » (A. Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation, 1912), il reste à interpréter, dans la sphère juridique, la valeur exacte de ces signes qui nomment le patrimoine pour le normer.