Depuis le début des années 2000, la Chine a fait l'objet d'une attention grandissante notamment sur son rôle comme puissance internationale majeure et son rapprochement diplomatique intense avec les gouvernements africains. À l'observation des médias officiels chinois, les questions auxquelles la Chine est confrontée ne vont pas sans tensions, voire, selon certains auteurs, sans contradictions (SHAMBAUGH, 2013). Dès lors, maîtriser l'image du comportement international du pays et la rendre cohérente est devenu un enjeu important pour la presse officielle (Renmin ribao, Huanqiu shibao). L'analyse du contenu comme de la forme générale des articles sur l'Afrique montrent plus concrètement des mécanismes rhétoriques propres au discours de la presse officielle sur la Chine elle--‐même et son positionnement international: la construction d'un récit exemplaire et simplifié des situations internationales, la constitution des acteurs internationaux en rôles du récit et la centralité indiscutable de la Chine dans ce récit qui la légitime en tant que leader du développement mondial. Plusieurs thématiques mettront en valeur la structure du récit ainsi créé: la victimisation continue de l'Afrique et la Chine, la réévaluation de la Chine par ses normes et valeurs et la concurrence internationale entre les Etats--‐Unis et la Chine. Deux conclusions semblent s'imposer quant au discours sur l'Afrique: d'une part, l'absence paradoxale de l'Afrique, c'est--‐a--‐dire le manque de reconnaissance de la diversité des acteurs africains, l'absence d'une histoire globale et d'une histoire de l'Afrique remplacée par un récit sur le monde et l'Afrique où la Chine tient un rôle central; d'autre part, le positionnement de la Chine comme héroïne des normes classiques du développement (croissance) et sa volonté de réévaluer en même temps les nouvelles normes internationales par ses propres "valeurs culturelles" pour en faire un modèle global.
Un détour continu par divers documents et mon terrain au Congo--‐Brazzaville aidera enfin à mettre en perspective les enjeux. De fait, La pratique du terrain permet de réintégrer dans le récit une "histoire en train de se faire" et de comprendre comment le contenu et la forme de cette presse marque les discours et les pratiques. Même s'il s'agit aussi de ne pas surévaluer leur place dans le quotidien des expatriés chinois plus influencé par des logiques multiples essentiellement pragmatiques, j'aimerais me demander comment la dimension axiologique du récit garde ses traces dans la manière dont ces expatriés composent un discours sur la Chine, sur eux--‐même comme Chinois et sur leur situation comme expatriés. Cela met entre autre en question la victimisation, la justification des normes, la méfiance envers chercheur et à la société locale.
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Since the early 2000s, China's position as a major international power has increasingly become a heated debate. The deepening of its diplomatic ties with African governments has been seen as one major symbol of a rising China in the international scene. Observing these new dynamics, some western scholars noticed that China official discourse is contradictory in its willing to be seen as a decision--‐making power and its adherence to the principle of non--‐interference (SHAMBAUGH, 2013). Therefore, an important role for the Chinese official press (Renmin Ribao, Huanqiu Shibao) has become to control the image of China's international behaving and make it coherent to its own population and to the outside world. The contents and also the general form of the discourse used in reporting Africa, show concretly some rhetorical patterns used in the official press about China and its role in the world affairs: the construction of an exemplary narrative about international, the establishment of various international actors as defined characters of this narrative and the unquestionable centrality of China in this narrative as the World development's leader. Several topics are often highlighted: a continuing victimization of Africa and China, the evaluation of Chinese standards and values and the international competition between United States and China. Two conclusions arise from analyzing this discourse on Africa in the Chinese official press. Firstly, the paradoxical absence of Africa; that is to say the lack of differentiation of African actors which should be various instead of one, the absence of a Global History and of an African History both being replaced by a narrative about the world and Africa where China plays a central role. Secondly, the China's international (self--‐)positioning mostly as a hero of classical norms (mainly GDP growth process) and at the same time its pushing in revaluating new international norms and standards through its own specific "cultural values" as a new model for the world.
Examples taken from other types of documents and my fieldwork in Congo--‐Brazzaville will help for discussing these issues. Indeed, fieldwork can reintegrate the diverse actors and the "History in process" into the narrative when comparing official discourse(s) with various fieldwork's situations. But I also want to question how the content and form of this narrative, its coherence and its contradictions mark the discourses and practices of the expatriates. We shall not overstate the importance of these issues within the daily life of Chinese in Congo which is more influenced by various pragmatic logics. Although, I'll try to understand how the axiological dimension of the narrative impregnates the way they explain their own situations, composing a discourse about China, about the "outside world" and about themselves as Chinese: this includes victimization standards, insecurity, mistrust in the researcher's aims and in the local society.