En Inde, l'accouchement a longtemps été exclusivement l'affaire de sages-femmes traditionnelles, les dāῑ. Les notions d'impureté (ashuddh) mais aussi de honte (sharam) et de « sale boulot » (gandā kām) étant étroitement associées à l'accouchement, il incombait traditionnellement aux « spécialistes des tâches impures » (Dumont, 1966 :70) de faire face aux souillures de l'accouchement (sūtaka). Aujourd'hui encore, si certaines de ces femmes sont appelées pour leurs savoir-faire, elles restent ordinairement sollicitées pour traiter physiquement les substances impures de l'accouchement (sang, cordon ombilical, placenta entre autres) et l'état impur dans lequel se trouvent la parturiente et le nouveau-né.
L'enjeu de cette présentation est d'analyser comment les questions du toucher et de la promiscuité avec les parturientes sont refaçonnées dans le contexte actuel d'institutionnalisation croissante de la maternité. A partir d'un terrain mené dans le service obstétrique d'un hôpital public à Jaipur (Rajasthan), nous montrerons que la minimisation des contacts est désormais moins liée à la notion de souillure rituelle (traditionnellement inhérente à l'accouchement) ou au suivi de règles hygiénistes (craintes de contagion), qu'à un dégoût socio-moral que les patientes – illettrées de classes/castes défavorisées – inspirent au personnel hospitalier.
For a long time in India, childbirth belong to the exclusive domain of traditional midwifes, the so called dāῑ. Because the notions of impurity (ashuddh), shame (sharam) and dirty work (gandā kām) are intrinsically connected to delivery, the impurity of delivery (sūtaka) used to fall to the “specialists of impure tasks” (Dumont, 1966: 70). Still today, even though some of these women are called for their skills, they remain particularly requested to physically handle the impure substances of delivery (blood, umbilical cord, placenta among others) as well as the impure state in which the mother and the newborn are.
The aim of this presentation consists in analysing how concerns on touching and on physical proximity are reshaped in the current context of the increasing institutionalisation of motherhood. Based on ethnographic fieldwork conducted in the obstetric service of a government hospital in Jaipur (Rajasthan), I will demonstrate that the minimisation of contact is driven less by the notion of ritual impurity (traditionally inherent of delivery) or by some hygienist prescriptions (aimed at preventing contamination) than by a feeling of socio-moral disgust that members of the hospital staff feel while being in contact with illiterates and underprivileged low cast/class patients.
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