Au Laos, des moines dits "socialement engagés" s'activent depuis quinze ans dans une lutte contre certains faits de santé aussi appréhendés comme des maux sociaux, à l'instar du VIH/sida. Défiant le silence qui l'entoure et les interdits monastiques, les moines adaptent leurs enseignements pour assurer un soutien aux souffrants et un travail de prévention dans les écoles et comités villageois. À partir d'une analyse de discours, recueillis par entretiens semi-directifs, cette communication interroge l'action normative à l'égard de la sexualité de cette réponse religieuse au sida. L'interprétation karmique conjuguant santé, bonheur et éthique, les moines entendent garantir un bien-être individuel comme collectif en aidant les laïcs à devenir de "bonnes personnes". Pour ce faire, ils semblent s'accorder un rôle dans la régulation des comportements en s'attachant à transmettre un code de conduite par l'enseignement du Dharma (doctrine bouddhiste), des cinq préceptes et de la distinction entre bien et mal, action favorable (boun) et défavorable (bap). Ainsi, quand nombre des enquêtés présentent le sida comme la conséquence de comportements jugés déviants (adultères, homosexualité, prostitution, toxicomanie), et l'associent au bap (mauvaise action karmique) dont découle le kam soua (mauvais karma), les moines engagés accordent un caractère moral et préventif à l'adoption de la bonne sexualité prescrite dans le troisième précepte.
In Laos, monks known as “socially engaged” have been involved since the early 21th century in the fight against ailments understood like health as well as social problems, in the manner of HIV/AIDS. Defying their monastic duties and the silence surrounding the pandemic, monks adapt their teaching to provide support to sufferers and prevention work in schools and village committees. Based on the analysis of speeches, collected by semi-structured interviews, this paper examines the normative action with regard to sexuality of this Buddhist response to AIDS. The karmic interpretation combines health, happiness and ethic, so monks intend to ensure individual and collective wellbeing by helping laypersons to become “good persons”. With this aim in mind, they seem to give themselves a role in behaviors regulation when they deliver a code of conduct by the teaching of Dharma (Buddhist's doctrine), the five precepts and the distinction of good and evil, positive and negative actions (boun and bap). Thus, while many respondents describe AIDS as consequence of behaviors deemed deviant (adultery, homosexuality, prostitution, drug addiction) and associate it to bap (bad karmic action) which lead to kam soua (bad karma), socially engaged monks attach both moral and preventive characteristics to the observance of the good sexuality prescribed by the third precept.