Ces deux volumes interrogent la pertinence d'un champ scientifique dévolu spécifiquement au monde khmer.
Le premier offre des outils pour une lecture contemporaine. Deux articles posent les cadres culturels post-angkoriens : l'emprunt au panthéon indien et le fait religieux bouddhique. Trois articles abordent ensuite la matière contemporaine : passée au crible de l'histoire quantitative, les archives permettent d'éclairer la paysannerie ; l'expérience khmère rouge conduit de nombreux Cambodgiens à reformuler leur histoire nationale ; l'ethnologie des populations montagnardes interroge sur la postérité du diagnostic des premiers orientalistes. Suit un état des lieux des bouleversements urbains subis par le Cambodge dans les deux dernières décennies, que complète une contre-lecture macro-économique révélatrice d'un capitalisme de prébende.
Le second volume s'attelle au cœur historique des études khmères, le Cambodge ancien, multipliant sources et approches. Couplée à d'autres disciplines, l'ethnologie restitue l'implantation des peuples sans écriture. La phonétique historique décrypte dans les sources chinoises les entités politiques du Cambodge ancien ; l'étude du fer angkorien renvoie aux deux versants constitutifs de la royauté. Avec les structures monumentales apparaissent deux discours narratifs, historique et légendaire, perpétués jusqu'à l'époque post-angkorienne. La philologie apporte son concours au passage de l'angkorien au post-angkorien à travers le terme varṇṇāśrama. Les documents de la pratique administrative sous Minh Mạng permettent de retracer l'implantation des Viêtnamiens dans le delta ; cent cinquante ans plus tard, le Đổi mới est illustré par une littérature spécifique. Six auteurs questionnent l'épistémologie de leur discipline. En linguistique, l'analyse grammaticale doit rendre compte de la totalité des énoncés. Un éclairage structural révèle une pratique religieuse rituelle fonctionnant comme un mécanisme. L'histoire du Cambodge ancien est paradoxalement fort peu écrite par des historiens. Quel statut accorder à la réflexion épistémologique, comme celle de Shelton Pollock sur la sanskritisation ? Comment expliquer la paucité de sources post-angkoriennes aux réécritures successives ?
Those two volumes question the relevance of a scientific field specifically dedicated to Khmerology.
The first presents some methodological tools for approaching contemporary Cambodia. Two papers draft the cultural post-Angkorian frame: the cultural borrowings from the Indian Pantheon and the Buddhist religious phenomenon. The following three study contemporary historiography: thanks to quantitative history screening, colonial archives give a new insight of rural society; the Khmer Rouge experiment led many Cambodian to renew their approach of national history; the ethnology of mountain populations questions the posterity of the first orientalists' proposals. An inventory of urban upheavals, due to land speculation and informal mismanagement, undergone by Cambodia during the two last decades follows, corroborated by a macro-economic appraisal of the two last decades showing the installation of crony-capitalism.
The second volume analyses the core of Khmer studies, ancient Cambodia, multiplying sources and approaches. Joined with other disciplines, ethnology proposes scenario of the current establishment of ‘people without writing'. Historical phonology deciphers the name of ancient Khmer political entities in Chinese sources; the study of Angkorian iron smelting informs two components constitutive of kingship. With the foundation of monumental structures appear two narratives, historical and mythographical, which prevailed until the post-Angkorian period. Philology assists in apprehending the social shift between the Angkorian and post-Angkorian period through the study of the lexeme varṇṇāśrama. Administrative documents under Minh Mạng' reign inform the establishment of Vietnamese rule in the Mekong delta; one hundred and fifty years later, Đổi mới initiates the production of a specific literature. In linguistics, the whole of enunciation must be taken into account by grammatical analysis. Structural anthropology reveals a ritual religious practice working as a mechanism. Notwithstanding that the history of ancient Cambodia is paradoxically scarcely written by historians, which status could be granted to epistemological reflection, such as Shelton Pollock's sanskritisation? How could be asserted the paucity of post-Angkorian sources and their successive re-writings?
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